Alors que s’ouvre le Davos Agenda, une semaine de dialogues organisée par le Forum économique mondial, Oxfam a publié un nouveau rapport intitulé « Le virus des inégalités ». L’ONG, qui s’est donné pour mission de trouver des solutions durables mettant fin aux injustices responsables de la pauvreté, révèle que la pandémie a engendré un accroissement amoral des inégalités économiques. Cette tendance touche simultanément la quasi-totalité des pays du monde, une situation sans précédent depuis plus d’un siècle.
La pandémie ayant entraîné la crise de l’emploi la plus grave depuis plus de 90 ans, des centaines de millions de personnes se trouvent désormais au chômage ou contraintes d’occuper des emplois précaires.
Selon Oxfam, plus de dix ans seront nécessaires aux personnes les plus pauvres pour se relever des impacts économiques de cette crise.
Parmi elles, puisqu’elles sont surreprésentées dans les professions précaires et peu rémunérées, les femmes sont les plus durement touchées.
« Cette crise arrive dans un monde déjà profondément inégal où une minorité de personnes, en majorité de très riches hommes blancs, accaparent l’essentiel des richesses mondiales », constate Quentin Parrinello, porte-parole d’Oxfam France.
Il a fallu à peine 9 mois aux 1000 personnes les plus riches du monde pour retrouver leur niveau de richesse d’avant la pandémie. Le rapport précise qu’à titre de comparaison, « suite à la crise financière de 2008, il avait fallu cinq ans pour que la richesse des milliardaires retrouve son niveau d’avant la crise. »
Non seulement la récession est déjà terminée pour eux, mais les dix hommes les plus riches ont vu leur fortune augmenter de 540 milliards de dollars depuis mars 2020. Une somme colossale, qui serait amplement suffisante pour financer le vaccin contre le virus pour toutes et tous.
En France, les milliardaires ont dépassé leur niveau de richesse d’avant la crise en gagnant près de 175 milliards d’euros entre mars et décembre 2020. Une somme équivalente à deux fois le budget de l’hôpital public français.
À titre d’exemple, la fortune de Bernard Arnault a augmenté de 44 milliards d’euros, soit un bond de 41 %. Il détient le titre du troisième homme le plus riche du monde selon le classement 2020 du magazine Forbes.
« L’explosion des inégalités n’est pas une fatalité et la responsabilité des gouvernements est au cœur du problème », rappelle Q. Parrinello. « Depuis des années, ils ignorent le problème et pire, ils aggravent ce fléau ».
« La pandémie de COVID-19 a été comparée à une radiographie qui révélerait des fractures dans le fragile squelette des sociétés que nous avons construites. Elle fait ressortir les aberrations et les contre-vérités que l’on entend partout : le mensonge selon lequel le libre-échange peut permettre de fournir des soins de santé à toutes et à tous, la fiction selon laquelle le travail non rémunéré qui consiste à apporter des soins à autrui n’est pas un travail, l’illusion de croire que nous vivons dans un monde post-raciste, le mythe selon lequel nous sommes tous dans le même bateau. Car si nous naviguons tous dans les mêmes eaux, il est clair que certains sont dans des méga-yachts tandis que d’autres s’accrochent aux débris qui dérivent. » analyse Antonio Guterres, Secrétaire général des Nations Unies
Pour Oxfam, la lutte contre les inégalités doit être au cœur des plans de relance et des économies post-Covid. L’ONG urge ainsi le gouvernement à réorienter sa politique en faveur d’une réduction des inégalités, à travers les mesures suivantes :
– Investir massivement dans les services publics pour assurer les besoins de base
– Revaloriser les minimas sociaux et les bas salaires, à commencer dans le secteur du soin
– Faire en sorte que les plus riches et les grandes entreprises payent leur juste part d’impôts
– Mettre en place des contreparties sociales et écologiques contraignantes pour les grandes entreprises
« Notre modèle économique permet à une élite d’amasser des richesses considérables pendant la récession la plus dramatique que nous ayons connue depuis la Grande Dépression, alors que des milliards de personnes, et notamment celles en première ligne de cette crise – peinent à payer leurs factures et à se nourrir », résume Q. Parrinello.
« Les gouvernements du monde entier ne doivent pas laisser passer cette opportunité de mettre en place un système économique plus juste et durable ».
plus d’infos : le rapport d’Oxfam à lire ici