Lumière sur une très belle initiative : l’Après M ! Suite à la liquidation judiciaire du McDo de Saint-Barthélémy (Marseille) le 12 décembre 2019, des salariés et de nombreux habitants du quartier se sont emparés du lieu pour le transformer en plateforme solidaire qui a permis de nourrir 300 000 personnes depuis le premier confinement. L’association l’Après M a transformé ce McDo en « fast-food social » : la démarche est un bel exemple d’une cohérence entre justice sociale et environnementale.
En décembre 2019, le Mc Donald’s de Saint-Barthélemy, un quartier du Nord de Marseille, est placé en liquidation judiciaire. Il constituait un lieu social central pour les habitants, un lieu de rencontre pour les jeunes et les familles. Mais surtout, il s’agissait d’un bassin d’emploi majeur : une centaine de salariés se retrouve alors au chômage.
Or à Saint-Barthélemy, la pauvreté est endémique. « En 1992 on nous a vendu un rêve, dynamiser l’emploi », témoigne Kamel Guemari, ex-salarié du McDo. « 28 ans après, au lieu de continuer à dynamiser, ils ont tout dynamité ».
Peu après la liquidation arrive le premier confinement. Ailleurs, on parle beaucoup de ceux qui ont peur de mourir du virus. Dans le Nord de Marseille, les gens ont peur de mourir de faim.
« Quand nous avons été confinés, le président a annoncé qu’on était en guerre », continue Kamel. « On savait déjà faire la guerre contre la misère, la violence, la justice, la discrimination sociale…On est nés dedans ».
Quelques-uns des ex-salariés de Mc Do et des habitants du quartier décident de transformer le lieu en plateforme solidaire. Celui-ci est rebaptisé l’Après M et l’association Après voit le jour.
Le fameux slogan est réinventé : « comme vous êtes, vous venez ! ». Autrement dit, puisque vous êtes des êtres humains, vous êtes les bienvenus ici.
Tous les lundis, une distribution alimentaire est organisée. Répondant à un besoin croissant, elle se poursuit durant des mois, jusqu’à aujourd’hui. La barre des 1000 colis distribués par semaine a été franchie, et la demande continue d’augmenter.
L’association fonctionne en flux tendu, sans savoir comment la distribution sera assurée le lundi suivant. Car celle-ci est uniquement portée par les dons des particuliers et des petits commerçants, ainsi que par une cagnotte en ligne. A l’époque, les pouvoirs publics n’ont pas versé un centime.
Les autres jours ont lieu des maraudes et des projets émergent, avec un même objectif : répondre à l’urgence humaine.
« Une équipe extraordinaire s’est formée », constate Kamel. « On essaye de réfléchir ensemble à des situations auxquelles personne n’arrive à faire face, et mettre en place ce qu’on veut pour notre quartier ».
Des dons de vêtements, des projets pédagogiques, des actions de végétalisation, de ramassage des déchets, des constructions d’habitat pour les sans-abris… De nombreuses autres missions sont venues se greffer au sein de l’Après M.
« Cette situation nous a fait grandir et a créé cette petite machine de guerre portée par l’intelligence collective » résume Kamel.
Pour la suite, l’ambition des bénévoles est de s’organiser en une société coopérative d’intérêt collectif (Scic). Grâce à la détermination des citoyens, la Mairie de Marseille a décidé de racheter l’ancien McDonald’s !
Le projet d’acquisition par la Ville, « autour de 650 000 euros », a été accepté par le président de McDonald’s France et sera présenté au conseil municipal le 9 juillet 2021.
L’association se désormais rêve en restaurant solidaire, où tout le monde pourrait venir manger des produits sains, où l’on pourrait cultiver la terre et produire du miel. L’idée est aussi de proposer des formations.
« On veut fournir des emplois plutôt que des colis », explique Kamel. « Des personnes cabossées par la vie ont été accueillies, accompagnées, orientées. Elles ont évolué, elles ont repris confiance en elles ».
Le 19 décembre 2020 a constitué une journée symbolique au cours de laquelle des bénévoles, toutes générations confondues, sont parvenus à servir 850 burgers en 2h30. Et pas des burgers ordinaires : élaborés avec des chefs cuistots, ils sont vegans, composés de produits bio fournis par des producteurs locaux et vendus à prix libre.
Un moyen de se poser en réaction par rapport à la pollution de Mc Donald’s, et de montrer la cohérence entre justice sociale et environnementale. Après l’annonce du rachat par la Mairie, les bénévoles vont maintenant essayer d’obtenir un bail emphytéotique afin de ne pas dépendre des changements politiques, et pérenniser leur activité solidaire.
Pour les aider : leur cagnotte en ligne et leurs actus