Depuis hier, la France est à découvert climatique. Cette année, le mercredi 17 mars marque en effet le Jour du Dérèglement. C’est-à-dire qu’en 2021, au bout de 77 jours, le pays a émis autant de gaz à effet de serre que ce qu’il devrait émettre en un an s’il respectait l’objectif de neutralité carbone.
Cet objectif, l’État s’est lui-même engagé à l’atteindre. Selon la loi Énergie-climat de 2019, et conformément à l’Accord de Paris, la France s’est donné pour objectif d’être neutre en carbone en 2050.
Cela signifie qu’à partir de cette date, le pays ne pourra rejeter dans l’atmosphère que 80 mégatonnes de CO2 par an, car il s’agit du seuil maximal de ce que nous serons en capacité de stocker.
C’est pour illustrer cette réalité que depuis l’année dernière, l’Affaire du Siècle calcule le Jour du dérèglement. Pour cela, l’initiative portée par Notre Affaire à Tous, la FNH, Greenpeace France et Oxfam France a fait appel à Carbone 4, un cabinet d’étude indépendant.
Une estimation des émissions de 2021 a ainsi été réalisée sur la base de données fournies par le Ministère de la transition écologique et solidaire (MTES). D’abord, la tendance historique des émissions françaises corrigées des variations climatiques jusqu’en 2018. Ensuite, la baisse conjoncturelle des émissions observée en 2020 sous l’effet de la Covid-19, estimée à -12% par rapport à 2019.
Quant à la limite d’émissions annuelles choisie pour la neutralité carbone il s’agit de celle que l’État s’est fixée dans la loi et la Stratégie nationale bas carbone : 80 MtCO2e maximum.
Cette année, le Jour du dérèglement arrive douze jours plus tard qu’en 2020, où il avait été calculé au 5 mars. Cependant, cette différence ne résulte pas de mesures politiques climatiques ambitieuses, mais des conditions sanitaires dues à la pandémie.
Le MTES estime ainsi qu’en 2020, la France a émis 52 mégatonnes d’équivalent CO2 en moins par rapport à 2019, soit une baisse de 12%. En revanche, en 2021, malgré les mesures restrictives qui se poursuivent, la France devrait tout de même émettre 389 mégatonnes de CO2 équivalent. Un rythme qui, s’il est maintenu, ne permettra d’atteindre la neutralité carbone prévue pour 2050 qu’en 2084.

Récemment, l’État a été condamné pour son inaction climatique. Bientôt, le Tribunal administratif et le Conseil d’État devraient lui ordonner de prendre des mesures concrètes et efficaces pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Pourtant, le projet de loi Climat et résilience porté par le gouvernement, qui doit être examiné d’ici quelques jours par le Parlement, n’apparaît pas à la hauteur de l’enjeu écologique.
Le Conseil national de la transition écologique, le Conseil économique, social et environnemental, et le Haut Conseil pour le Climat ont en effet tous les trois jugé que le projet de loi se trouvait insuffisant au regard des objectifs climatiques.
Les membres de la Convention Citoyenne pour le Climat ont pour leur part donné une note moyenne de 3,3 au texte, alors que le projet de loi devait reprendre leurs propositions.
Dans ce contexte, alors que les témoignages sur les effets concrets des changements climatiques se multiplient, près de 300 organisations ont appelé à une Marche pour une vraie loi Climat le 28 mars prochain. Une preuve supplémentaire que citoyennes et citoyens souhaitent des actions fortes pour le climat.