Dans plusieurs villes de France, le collectif des « gars’pilleurs » a décidé de combattre le gaspillage alimentaire. À l’origine, des Lyonnais qui avaient l’habitude de faire les fins de marché. Puis peu à peu, le groupe s’est structuré et milite désormais pour que les millions de tonnes de nourriture qui sont jetées chaque année en France soient redistribuées gratuitement. On les remercie !
Glanage et solidarité
Les « gars’pilleurs », c’est un collectif de pilleurs de poubelles né durant l’hiver 2013, à l’initiative de deux Lyonnais. S’organisant grâce à diverses plates-formes pour mener des actions ponctuelles ou systématiques, ces glaneurs et ces glaneuses des temps modernes s’en prennent surtout aux invendus alimentaires des supermarchés, qui pour la plupart sans jetés sans vergogne, malgré les nouvelles restrictions en la matière depuis 2016 et 2018.
Ras le bol ! Sans attendre l’assentiment ou la coopération des distributeurs, les gars’pilleurs ont décidé de récolter eux-mêmes les invendus dans les poubelles et de les redistribuer librement, à la fois pour épargner les ressources et dénoncer le gaspillage alimentaire. Depuis 2013, ce mouvement à l’origine lyonnais a pris une envergure nationale et des actions ont lieu aujourd’hui aux quatre coins du pays, comme le 27 décembre 2019 à Rouen ou le 12 janvier dernier à Charleville-Mézières dans les Ardennes.
Certes, leur action est écologique et solidaire, mais les gars’pilleurs militent surtout pour le bon sens, car le gaspillage alimentaire est un fléau qui ne cesse de croître dans les pays développés et ne semble pourtant choquer personne, ou presque.
Le gaspillage alimentaire, fléau moderne
Mais avant d’aller plus loin, procédons à un petit tour d’horizon. Que représente aujourd’hui le gaspillage alimentaire ? Dans le monde, un tiers de la production destinée à l’alimentation de l’être humain est perdu, jeté, gaspillé, ce qui représente 1,3 milliard de tonnes de nourriture par an. Depuis les années 1970, ce chiffre a doublé et il semblerait que plus un pays est développé, plus il consomme de ressources, plus il gaspille.
En France, nous gâchons entre 7 et 10 millions de tonnes de produits consommables par an, rien qu’en aval de la chaîne de production, c’est-à-dire sans tenir compte du gaspillage qui se situe en amont de la transformation des produits. Car la moitié du gaspillage a en fait lieu bien avant que les produits soient fabriqués : par exemple, des dizaines de milliers de tonnes de fruits et légumes sont jetés ou « méthanisés » (transformés en gaz naturel) chaque année parce qu’ils ne correspondent pas aux critères de calibrage et d’allure imposés par les distributeurs.
Résultat : 28 % des terres agricoles de la planète serviraient à produire des aliments gaspillés
De l’eau est vainement consommée en immenses quantités ; toutes sortes de pollutions, des gaz à effet de serre aux emballages, sont émises uniquement pour que les aliments finissent à la poubelle… Sans compter le coût du gaspillage ! Outre que celui-ci nous fait dépenser davantage, nous payons également plus cher les produits que nous consommons, car un pourcentage de pertes est toujours calculé dans le prix des aliments. Et pendant ce temps, des centaines de millions de personnes dans le monde souffrent de la faim…
Un mode d’action simple et efficace
Revenons maintenant aux « gars’pilleurs ». Leur mode d’action est simple et reproductible (il est d’ailleurs publié en ligne). Équipés de lampes frontales, de sacs, de blousons serrés et de gants, ils se se rendent en petits groupes, à la tombée de la nuit ou juste avant le jour, dans les endroits obscurs où dorment les poubelles. Marchés, boulangeries, petites et moyennes surfaces, les gars’pilleurs récupèrent toutes les denrées qui ont été jetées alors qu’elles étaient encore consommables.
Leur récolte peut aller des fruits et légumes frais aux fromages et aux divers yaourts, en passant par les croquettes, les soupes, les pâtes, les condiments… N’enfreignant aucune loi lorsque les poubelles sont à l’air libre, ils frisent pourtant l’illégalité quand elles sont gardées dans des lieux privés, souvent enceints de barbelés ou de taules.
Leur commando nocturne se termine le plus souvent sur une place publique, où les gars’pilleurs distribuent des dizaines, voire des centaines de kilos de nourriture gratuitement. Et pour savoir où ces distributions ponctuelles sont mises en œuvre, les organisateurs comptent sur les réseaux sociaux.
Souvent relayée par les médias, c’est une initiative louable qui mériterait de faire davantage d’adeptes. Renseignez-vous pour savoir si des gars’pilleurs sévissent dans votre ville !