Jeudi 1er juin 2017, alors que les actionnaires se rendaient au siège du groupe à Puteaux pour l’Assemblée générale annuelle, ceux-ci ont été accueillis par des banderoles, des slogans et… des poissons morts. Ce rassemblement au pied de la tour de la multinationale était orchestré par des manifestants afin d’alerter sur les pratiques d’une des sociétés dont le groupe est actionnaire : Socfin, la Société financière des caoutchoucs.
On pouvait lire sur les pancartes des militants des messages tels que : « Bolloré, entreprise irresponsable », « plantations socfin = poissons morts, eaux polluées ! », ou encore : « La Socfin piétine les droits des communautés ». En effet, cette manifestation menée par une coalition d’organisations françaises et internationales ainsi que des associations de ressortissants africains (Attac, ReAct, sortir du colonialisme, GRAIN, ActionAid France, Survie, Unef…) avait pour but d’interpeller sur les problématiques que rencontrent les communautés victimes de cette entreprise et de mettre en place une action coup de poing pour marquer les esprits. Mais ce n’est pas tout, parallèlement, certains militants, également actionnaires du groupe Bolloré, étaient présents lors de l’AG afin de demander des explications de la part de Vincent Bolloré, PDG du groupe.
Le groupe Bolloré et Socfin
Créé en 1822, le groupe Bolloré est une société cotée en bourse qui fait aujourd’hui partie des 500 plus grandes compagnies mondiales. Présent dans les domaines du transport et de la logistique, de la communication, ainsi que des solutions de stockage d’électricité, le groupe dégage un chiffre d’affaires d’environ 10 076 millions d’euros par an.

Le groupe Socfin quant à lui, une société spécialisée dans la plantation de caoutchouc et d’huile de palme, est détenu à 38,8% par le groupe Bolloré. Basée au Luxembourg, cette société gère environ 189 000 hectares de plantations à travers le monde. Cependant, depuis plusieurs années la société est accusée de « pratiques douteuses » par les communautés locales d’Asie et d’Afrique : pollution des eaux et rivières, absence de transparence sur la cartographie des terres de la société et achats controversés des terres agricoles que les communautés qualifient « d’accaparement » sans contrepartie ou presque. Autant d’accusations que la Socfin dément : « le groupe Socfin n’accapare pas les terres des villageois ; on nous la propose ou on la demande quand des missions exploratoires ont démontré la faisabilité économique, environnementale et sociale ». L’entreprise assure également indemniser les communautés en les rémunérant pour la terre ou la perte de plantations, en les réinstallant sur d’autres parcelles ou encore en laissant aux villageois un espace vital à disposition sur leurs anciennes terres.
Quelles sont les demandes ?
L’Alliance internationale des riverains des pays des plantations Socfin/Bolloré (soutenue par l’ONG française ReAct) souhaite des déclarations de bonnes intentions. Dans un communiqué publié jeudi la coalition affirme que « les surfaces plantées des sociétés africaines de la Socfin sont passées de 129 658 à 185 324 hectares entre 2009 et 2015. Soit une augmentation de plus de 40 % qui s’est faite le plus souvent au détriment des communautés locales ».

Selon l’Alliance, le groupe Bolloré doit faire pression sur la Socfin afin d’ouvrir le dialogue sur la rétrocession des terres et leurs compensations financières et sociales. Ainsi, d’après Marielle Benchehboune, militante et membre de la coalition, Vincent Bolloré se serait engagé lors de l’AG de jeudi dernier à « œuvrer pour la mise en place d’un dialogue entre Socfin et l’Alliance ».
Nous espérons que le groupe Bolloré et Socfin respecteront les valeurs qu’ils prônent dans leurs engagements de « préservation » et de « respect des aspects sociaux et environnementaux ». De son côté, le syndicat des paysans riverains de la Socapalm (filiale de la Socfin) au Cameroun précise que « cette première action internationale n’est que le début. Nous sommes déterminés à faire respecter nos droits. Nous demandons maintenant que soit organisée une négociation transnationale, avec des représentants des riverains de tous les pays. »
Crédit photo : ERIC PIERMONT / AFP – Image dans le texte : ONG Survie

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