Pour la deuxième édition, Grenoble accueille la Biennale des Villes en transition. Pendant une semaine, société civile, acteurs locaux, chercheurs et élu-e-s de nombreux pays vont se retrouver pour échanger autour des questions sociales et environnementales d’un enjeu central : assurer la résilience des territoires face aux défis climatiques et énergétiques du XXIème siècle.

Construire une nouvelle société dans la convivialité

Au cœur des Alpes, la Ville de Grenoble ressent le dérèglement climatique plus fort et plus vite. Cet été, des pans de montagnes se sont littéralement effondrés à cause de la fonte du permafrost. On les croyait immuables, voir ces géants minéraux s’écrouler ébranle l’imaginaire collectif des habitant-e-s en leur montrant les conséquences impressionnantes du dérèglement climatique. Avec sa situation géographique dans une « cuvette », la pollution de l’air est un défi quotidien pour la métropole qui met à jour son Plan Climat en 2019, en concertation avec les citoyen-ne-s.

Logique, donc, que la Ville de Grenoble ait compris l’importance de s’inscrire dans le mouvement des Villes en transition, initié par Rob Hopkins, qui vise à faire prendre conscience aux citoyen-ne-s d’un territoire « des profondes conséquences que vont avoir sur nos vies la convergence du pic du pétrole et du changement du climat et la nécessité de s’y préparer concrètement. » En Mars 2019, la Ville de Grenoble organise pour la deuxième fois la Biennale des Villes en Transition pour en rassembler les acteurs et favoriser le partage des bonnes pratiques avec 20 villes du monde entier.

« A Grenoble, nous travaillons sur la façon de garantir des sécurités à nos habitant-e-s. Le logement, la mobilité et l’alimentation sont à la fois les trois dépenses contraintes majeures des ménages, et les trois enjeux majeurs de la transition écologique et sociale. La Biennale des Villes en transition sert à diffuser et populariser ce qui se fait, en montrant que la transition peut être joyeuse et fédératrice. Nous pouvons prendre plaisir à agir ensemble, plutôt qu’être angoissé face à l’ampleur des changements qu’il y a à faire. » Eric Piolle, Maire de Grenoble

La volonté d’accomplir une transition environnementale et sociale se ressent en voyant les très nombreux intervenant-e-s qui partageront leur expérience lors de l’événement. La Biennale 2019 a également des parrains et marraines de qualité comme Doussou Keita, comédienne et demandeuse d’asile à Grenoble, Pablo Servigne, chercheur in-terre-dépendant, la chanteuse Emily Loizeau, et le réalisateur de Demain et Après-demain Cyril Dion. Les thématiques abordées cette année : alimentation, logement, mobilité, biens communs, démocratie participative, énergie, monnaie locale, gestion des déchets, immigration ou encore autonomie alimentaire.

Le champ d’action d’une métropole

Viser l’autonomie alimentaire pour une métropole comme Grenoble (158 000 habitants) est emblématique de la façon de concevoir la résilience d’un territoire. La Ferme urbaine lancée en novembre 2018 fait ainsi partie d’une logique plus grande dans le rapport de la Ville avec son territoire sur l’alimentation.

« Nous ne sommes pas du tout dans une logique de « métropole phare de l’humanité ». Une Ville comme Grenoble ne peut pas atteindre l’autonomie alimentaire à 100 %, nous n’avons donc pas du tout une volonté autarcique, au contraire. Avec des réserves de nourriture d’une semaine seulement, nous sommes bien conscients que les villes sont en réalité extrêmement dépendantes des zones péri-urbaines. Le mouvement des gilets jaunes ne dit pas autre chose : que cela soit pour l’énergie, la biodiversité, la gestion des déchets, l’eau, il y a une connexion totale entre les villes et les territoires alentours. Nous travaillons donc sur le rapport entre ville et territoire, ville et villages, et chez nous évidemment la montagne. » Eric Piolle, Maire de Grenoble

Pour la Ville, la question de l’énergie est centrale car elle est connectée au logement et au chauffage, à la mobilité, et aux besoins spécifiques en électricité. L’énergéticien public local Gaz Électricité de Grenoble veut couvrir en 2022 la consommation des Grenoblois uniquement en énergies renouvelables. La Ville de Grenoble a également décidé de transformer ses boues d’épuration en biométhane, réinjecté dans le réseau de gaz naturel, grâce à la station d’épuration Aquapole. Cependant, les actions d’une métropole comme Grenoble peuvent se heurter à une stratégie nationale différente qui bloque des projets ou favorise des projets controversés comme l’agrandissement de l’A480 qui fait suite au Décret n°2015-1044 du 21 août 2015 porté par Manuel Valls.

« Nous avons besoin d’agir de façon transversale pour résoudre le défi environnemental et social. Mais à l’échelle nationale, on peut faire le constat que le gouvernement Macron a fait un tout autre choix : la conservation du système et des élites. C’est un blocage majeur dans les projets qu’une métropole pourrait organiser car nous avons besoin d’un Etat stratège, et aujourd’hui nous avons un Etat centralisateur et contrôleur qui suit une logique ultralibérale consistant à contrôler les dépenses publiques pour les réduire le plus possible à court terme, sans penser à long terme. » Eric Piolle, Maire de Grenoble

A l’image d’Alexandria Ocasio-Cortez et de nombreux démocrates Outre-Atlantique, le Maire de Grenoble défend l’idée d’un Green New Deal pour changer les règles de la comptabilité publique, et permettre d’avoir des projets financés par la création de ressources ou l’économie des dépenses à long terme.

« Typiquement, nous avons lancé la rénovation énergétique de trois groupes scolaires cette année. Avec un Green New Deal, nous pourrions le faire sur l’ensemble de nos écoles même si le retour sur investissement est à 25/30/35 ans. C’est en pratique tout à fait acceptable pour un acteur public. Pour les réseaux d’eau on investit bien sur 100 ans, mais là on est bloqués sur ces projets pourtant rentables, qui créent de l’emploi, qui vont faire des économies à long terme, et sont plus respectueux de l’environnement.Cela ne sert à rien de faire des plans à 2050 si on ne commence pas à agir tout de suite, quand on voit que les émissions de GES sont reparties à la hausse ces dernières années. » Eric Piolle, Maire de Grenoble

La Ville de Grenoble, à travers la Biennale des Villes en transition, veut donc promouvoir l’importance de mettre en place dès maintenant des solutions dont les bénéfices durent dans le temps. « Le changement est évidemment difficile, mais on peut y prendre du plaisir : celui de faire ensemble, tout en accomplissant notre humanité et notre fraternité. » Eric Piolle, Maire de Grenoble