Génération ingouvernable est un mouvement né des manifestations anti loi El-Khomri. Elle est principalement composée de jeunes, attire de plus en plus et prône le refus catégorique de voter. Pour la plupart des membres, la violence est devenue le seul canal de communication entre les citoyens et le gouvernement.
« 1789, les casseurs prennent la Bastille »
Brûler des cartes électorales (fausses ou non) tel un symbole du refus catégorique de voter aux prochaines élections : voici les images qui tournent sur les réseaux sociaux et qui proviennent des membres de Génération Ingouvernable. Si ce n’est pas un refus de la démocratie et du droit de vote, c’est l’expression d’une colère incompressible envers un gouvernement en place et à venir qui ne semble plus légitime. Né notamment lors des manifestations anti loi El-Khomri ou encore Nuit Debout, la création Génération Ingouvernable s’est officialisée fin janvier à Montreuil lors d’un week-end de débat national et d’un feu de joie. Les manifestants les plus virulents et qui souhaitaient conserver l’expression de leurs revendications dans la durée ont gardé contact et se sont retrouvés autour d’un objectif commun : le renversement du gouvernement.
Parmi ceux qui ne sont pas d’accord avec la loi en place, de nombreux comportements peuvent être adoptés afin de manifester un désaccord : la manifestation, la marche, la communication écrite de masse ou individuelle, les habitudes de consommation et/ou la violence. Pour de nombreux membres de ce collectif, il est clair que la violence et la radicalité apparaissent comme le seul moyen d’interpeller et d’occasionner une quelconque réaction de la part du gouvernement, même si cette réaction se manifeste sous forme de coups de matraques ou de tirs de flash ball.

Contre le vote « pour le moins pire »
Le choix de s’élever contre les élections s’exprime par un ras-le-bol : « 2017 sera une année décisive, marquée par un climat politique confus et organisé autour des idées de l’extrême droite : racisme et austérité, nationalisme et sécurité. Les élections présidentielles sont pour beaucoup un moment important de la vie politique. On nous impose différents programmes et à nous de les valider par notre vote, en d’autres termes de « choisir le moins pire ». Nous sommes nombreuses et nombreux à ne plus croire dans ces élections, que nous ayons déjà voté, jamais ou seulement par dépit.
La classe politique le sait et nous en faisons la douloureuse expérience, les élections auront lieu avec ou sans nous, tout en nous éjectant d’office du débat politique et de ses thématiques. Il est temps de poser pour nous et celles et ceux qui se reconnaissent dans cet appel un agenda politique avec nos problèmes, qui auront des impacts réels et immédiats. » De plus, les membres de Génération Ingouvernable veulent prendre la plume et proposer des actions, des idées concrètes, notamment pour arrêter d’être considérés comme de simples casseurs qui veulent se décharger tout en loupant les cours. Pour eux, la culpabilisation des abstentionnistes alors que « leur score » a atteint les 20 % en 2012 est une ignominie « L’acte de voter, c’est donner sa voix, sa confiance à un-e individu représentant un parti politique, c’est-à-dire s’en remettre à des professionnel-le-s ». Si aucun des candidats ne semble à la hauteur, pourquoi « voter blanc » devient un gros mot en ces temps électoraux ?
Méthodologie de renversement
Les références parlent d’elles-mêmes : « Les printemps arabes, la région autonome du Chiapas, l’expérience du confédéralisme démocratique au Kurdistan et la Zad de Notre-Dame-des-Landes » et se veulent intransigeantes « collage d’affiche, en passant par le blocage ou l’occupation, voire l’attaque de locaux ciblés ». Les banderoles brandies aux premiers rangs des manifestations ou encore les tags qui encrent les mouvements après leur passage sont éloquents « L’Etat nous pisse dessus, les médias disent qu’il pleut », « Plutôt casseur qu’électeur », « Voter, c’est abdiquer », « Banquiers voleurs, médias menteurs »… Au micro de Basta Mag, la jeune Marie, militante de la première heure s’explique « J’ai vu un homme menacer de se suicider pour avoir un toit, quitte à dormir en prison. Ça a été un déclic, en terme de conscience sociale. ».
Radicalisée en quelques jours en Grèce, la misère l’a frappée et elle a entendu l’appel de ceux que la crise a laissé derrière. Dès son retour, elle se donne cœur et âme dans les manifestations contre la loi travail et explique son militantisme virulent « J’ai ressenti un sentiment de puissance à mener une action à bien. C’est une émotion intense que de réussir à se soulever face à un pouvoir qui nous dépasse habituellement ». Comme Marie, les membres du collectif croient en la révolution comme outil ultime de renversement afin de reconstruire une nouvelle société après avoir fait table rase, même si dans l’exemple de la loi travail, le militantisme n’a pas payé. Alice, également interviewée par Basta Mag, explique que même si le résultat n’est pas immédiat, le signal d’alarme a été sonné « La violence transcende les discours. C’est une manifestation concrète de la colère. Un moyen de se réapproprier l’espace collectif face à la police et l’état. »

La révolution : prémisse d’une guerre civile ou insufflation d’un nouveau système
Les gens descendent dans la rue, manifestent, crient et cassent avec la puissance d’une colère qui grandit. La société et ceux qui luttent pour un nouveau système ne reconnaissent plus la légitimité de l’Etat en place et ont trouvé comme unique et seul lien : la violence ! La violence entraîne la violence et les ripostes policières se font de plus en plus virulentes. Est-ce que cette agressivité peut être facteur d’un véritable changement ? Est-ce que, au même titre que ce gouvernement, la violence peut être considérée comme légitime aux yeux de l’État, mais aussi du reste de la population ? Est-ce que ce sont réellement les hommes et femmes politiques qui payent les blocus, la casse et le ralentissement de la vie urbaine ? Est-ce que l’on n’arrive pas à un point où les deux partis sont blasés par les actions de l’autre et que la communication est définitivement rompue ? Faut-il totalement briser le système en place plutôt que de lui faire vivre des réformes profondes ? Qui va payer pour les aller-retours violents entre les citoyens et le mur gouvernemental ? Tant de questions en suspens qui laissent la confiance à plat et tranche les citoyens en d’innombrables parties qui finalement ont un point commun : ce qu’elles ne veulent plus.
Sources : BastaMag / Vice News / Paris-luttes.info / Génération Ingouvernable

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