Le débat sur la question des violences dont souffrent les femmes est plus que jamais d’actualité après qu’une journaliste égyptienne présente son émission de télévision en apparaissant le visage faussement tuméfié. Afin de dénoncer les violences conjugales faites en Egypte, des femmes égyptiennes engagées prennent des initiatives pour soutenir les victimes.
Depuis le soulèvement contre le gouvernement en janvier 2011, les Egyptiens vivent dans un état presque permanent de troubles et d’instabilité politique, avec deux présidents destitués, deux constitutions approuvées et une succession de gouvernements. La violence infligée aux femmes et aux filles, ainsi que l’incapacité des autorités à mettre en place des actions significatives pour y remédier, ont été les seules constantes au milieu de ces bouleversements.
En effet dans un contexte de division et de violence politique, les autorités ont utilisé la violence à l’égard des femmes comme enjeu politique : en accusant leurs opposants politiques d’en être responsables sans pour autant prendre de mesures pour les faire cesser. De plus, les autorités égyptiennes ont systématiquement échoué dans leur devoir de fournir aux victimes de ces violences une réparation ou une indemnisation pour les préjudices subis, notamment un suivi physique et psychologique.
C’est pour pallier cette absence de soutien politique qu’aujourd’hui des femmes égyptiennes prennent des initiatives afin de sensibiliser la population locale et internationale à la violence conjugale en Egypte. Bien qu’il soit encore difficile d’évaluer l’étendue et la nature exacte des différentes formes de violence envers les femmes et les filles en Egypte en raison de l’absence d’informations statistiques précises, officielles et à jour, on sait que la violence à l’égard des femmes y est courante, à la fois dans les foyers, dans la sphère publique et en prison.
En effet, en 2015 Amnesty International publiait un rapport inquiétant :
“Les femmes et les jeunes filles en Egypte vivent avec la menace tapie et omniprésente de la violence physique et sexuelle, et ce dans toutes les facettes de leur vie. A la maison, beaucoup subissent les coups, les agressions et les violences cruelles de la part de leurs époux et de leurs proches”, avait expliqué une responsable de l’ONG dans le rapport.
Crédit : RT
Le 7 octobre 2017, la journaliste Manal Agha, est apparue à la télévision égyptienne le visage abîmé par les coups. Elle prétend d’abord avoir été battue par son compagnon, puis révèle quelques minutes plus tard que ces marques n’étaient que du maquillage. Son objectif ? Inciter les femmes qui subissent des violences à parler et à ne pas rester piégées dans ce qu’elles vivent.
Manal Agha n’est pas la seule égyptienne ayant la volonté de soutenir les victimes de violences conjugales. Depuis 1995, Azza Soliman, fondatrice du CEWLA (Center for Egyptian Women’s Legal Assistance – Centre pour une assistance juridique aux Égyptiennes) situé au Caire, mène un combat sans relâche contre les violences faites aux femmes en apportant son soutien aux victimes. Bien que décrite par le gouvernement égyptien comme une “espionne” qui “met en danger la sécurité du pays” et incite à la “libération irresponsable” des femmes, elle continue à dénoncer les viols et agressions envers les femmes en Egypte.

Credit: Front Line Defenders
“Ici, nous aidons toutes les femmes, peu importe leur religion, leur appartenance politique, leur origine”, a déclaré la fondatrice de CEWLA.
Depuis 2005, Mozn Hassan, activiste féministe égyptienne, soutient également les femmes en Egypte, par le biais de Nazra for Feminist Studies (ou simplement Nazra) qu’elle fonde en 2005. Par le biais de cette organisation, elle cherche à contribuer à la continuité et au développement du mouvement féministe égyptien et régional au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, où le féminisme et le genre sont des questions politiques et sociales affectant la liberté et le développement dans toutes les sociétés. Nazra a documenté et dénoncé depuis sa création un nombre effarant d’agressions physiques et sexuelles et soutenu des milliers de femmes.

Bien que le combat contre les violences faites aux femmes soit dangereux, que le processus de changement soit long, ancré dans un régime politique encore conservateur où Abdel Fattah al-Sissi réprimande les activistes, des femmes en Egypte n’arrêtent pas la lutte et continuent d’élever la voix quotidiennement pour la reconnaissance et le respect de leurs droits.

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