10 familles venant de huit pays se sont alliées pour déposer plainte contre l’Union européenne pour son manque d’action dans la lutte contre le réchauffement climatique. Leur but n’est pas d’obtenir des dédommagements financiers, mais que l’Union Européenne revoie ses engagements climatiques de 2030 pour protéger au mieux les générations futures.
Partout dans le monde, le changement climatique affecte déjà les populations
Pour la première fois dans l’histoire de l’Union Européenne, la Cour de Justice a jugé recevable une plainte assignée par 10 familles pour objectif climatique 2030 inadéquat et violation des droits humains contre le Parlement et le Conseil européens. Qu’elles vivent au Portugal, en Allemagne, en France, en Italie, en Roumanie, au Kenya, aux Fiji et en Suède, toutes ces familles risquent de perdre leur mode de vie traditionnel à cause du changement climatique.
Les Sami sont une population indigène suédoise qui élève des rennes. Le réchauffement climatique menace la survie de leurs animaux, mais aussi leur folklore.
Au Portugal, la sécheresse a provoqué un immense feu de forêt qui a détruit tous les hectares d’un sylviculteur, aridifie les terres de familles d’agriculteurs, et met en péril les abeilles d’un apiculteur.
En Allemagne, l’établissement de restaurateurs est menacé par la montée des eaux. Au Kenya, les écoliers ne peuvent plus parcourir les 1,5km à pied pour aller étudier à cause des chaleurs insoutenables. En Roumanie, une famille d’agriculteurs doit aller chercher toujours plus haut la nourriture pour ses bêtes.
« Les plaignants sont des familles qui affrontent des vagues de canicule, la sécheresse, des inondations, la fonte des glaces dus au changement climatique. Toutes ces familles désirent la même chose : que l’Union Européenne prenne des engagements plus ambitieux sur le climat pour protéger leurs enfants dans le futur. » Roda Verheyen, Avocate des familles
Une première étape primordiale
Déposée fin mai 2018, leur plainte a été officiellement acceptée par la Cour de Justice de l’Union européenne ce 13 août 2018. Cette annonce intervient alors que de nombreux habitants de l’Europe sont toujours soumis à des vagues de chaleur, des sécheresses et des incendies.

« L’Europe s’est considérée comme privilégiée pendant un temps, alors que nous sommes en réalité très vulnérables, en témoigne la canicule actuelle. Aujourd’hui, un Européen sur 20 est, chaque année, en proie à un événement climatique extrême. Si rien n’est fait pour maîtriser le réchauffement, cette proportion pourrait atteindre deux tiers de la population d’ici 2050. Le nombre de décès liés aux extrêmes climatiques (essentiellement aux épisodes de canicule) pourrait également être multiplié par 50 dans la deuxième partie du siècle, passant de 3 000 à 150 000 victimes annuelles. Enfin, en France, une projection des risques de feux de forêts à horizon 2050 indique que des régions jusqu’ici épargnées pourraient être sujettes aux flammes, notamment dans le centre et l’ouest du pays. » Jean Jouzel, climatologue, propos rapportés par Alternatives Economiques
Cette première étape est donc primordiale pour que les Européens prennent les devants face à l’ampleur de la menace. En France, le lavandiculteur Maurice Feschet a perdu 44 % du rendement de son exploitation à cause du réchauffement climatique. Sa famille est accompagnée dans la procédure juridique par l’association « Notre Affaire à tous ».

« Pour la première fois, des citoyens vont vraiment pouvoir plaider leur cause au sujet du climat devant les tribunaux de l’Union Européenne. Il s’agit d’une triple victoire : pour les plaignants d’abord, qui pourront défendre leurs droits ; pour la démocratie, car il est essentiel que les citoyens aient accès à la justice pour défendre leur environnement ; pour le climat enfin, car les juges prononceront peut-être une décision contraignante pour l’Union et les Etats membres, afin qu’ils tiennent leurs engagements oraux. » Marie Toussaint, présidente de Notre Affaire à tous
Le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ont désormais deux mois pour présenter leur défense. Espérons que la demande d’une justice climatique soit enfin appliquée. Comme dirait le père de famille Fidjien, Petero Qaloibau : « Ce que l’on sème aujourd’hui, nous le récolterons demain ».