La nouvelle année n’a pas été un renouveau pour l’hôpital public. Ce lundi à nouveau ils manifestaient pour dénoncer la crise qui sévit dans les urgences et les services pédiatriques, obligeant de nombreux services à transférer les enfants.
L’alerte avait déjà été donnée en novembre. À cause d’une erreur d’appréciation des autorités sanitaires, qui ont ouvert des stages pour les internes sans contrainte géographique, treize hôpitaux de la couronne parisienne se retrouvent incapables d’assurer le service d’urgence pédiatrique, en plein pic de maladies hivernales.
Ce sont 25 nourrissons qui ont été transférés entre octobre et mi décembre à plus de 150km du domicile de leur parent faute de place en région parisienne. Le 1er janvier, scénario encore plus alarmant dans la Sarthe : le centre hospitalier du Mans a fermé son service de réanimation pédiatrique, envoyant les enfants à plus de 100km.
La dégradation des services publics en France semble arriver au point où elle révèle ce qu’il y a derrière un service public : la vie des gens. La marchandisation et l’exigence de rentabilité dans nos hôpitaux, nos transports, notre sécurité sociale, notre école, met en danger les individus dans leur développement, leur sécurité et leur vie même. Le documentaire Dans le ventre de l’hôpital de Jérôme Lemaire sorti en 2018 montrait les effets quotidiens de la réduction des moyens, de l’exigence de rentabilité, de la déshumanisation et de la perte de sens dans un service de chirurgie de l’hôpital St Louis à Paris.
Ce sont bien toujours les mêmes mécanismes qui sont à l’oeuvre : les services publics sont au mains de gestionnaires qui comptabilisent, échangent des personnels et des places comme les traders revoient à la hausse ou à la baisse les valeurs boursières. Le personnel est moins en moins bien formé, l’organisation ne s’adapte pas aux nouvelles réalités sociales, et tous les métiers des services publics se retrouvent à devoir remplir une quantité de paperasse qui les éloigne de leur véritable métier.
Depuis le 3 janvier, des parents ont lancé une pétition, récoltant près de 80 000 signatures. Ils écrivent :
“Nous ne pouvons nous résigner à ce qu’en France des situations comme celles-ci puissent s’installer durablement. Nous n’acceptons pas que la 6ème puissance mondiale mette ses enfants en danger pour des raisons budgétaires.”
Les crises ne sont pas prêtes de s’éteindre en France, car c’est la crise de tout un système qui est à l’oeuvre. Il pourrait en sortir l’enfoncement dans la violence sociale qui est déjà là, l’impossibilité entre les différents corps sociaux de se parler, la dégradation des perspectives d’avenir pour la jeunesse, la précarisation des gens et le repli sur soi. Il pourrait aussi en sortir de nouvelles perspectives d’organisations sociales et politiques, si nous savions encore nous parler et nous écouter.