Si les violences générales semblent s’estomper, celle que subissent les journalistes semble prendre de l’ampleur. Lors de l’acte 9 des Gilets Jaunes ce samedi, « Incontestablement, samedi, un cap a été franchi », déclare Christophe Deloire, secrétaire général de l’ONG Reporters sans frontières. Suite à l’agression d’un journaliste de LCI roué de coups alors qu’il était à terre à Rouen ce samedi, TF1 porte plainte. À Toulouse, une journaliste de La dépêche du midi a été menacée de viol.
Toulon, Marseille, Pau, Bourges… le exemples se multiplient. Si de nombreux gilets jaunes défendent les journalistes en s’interposant, les agressions se multiplient et la violence se fait de plus en plus forte. Pourtant depuis le mois de décembre, des syndicats de journalistes ont aleterté le gouvernement. Que s’est–il passé pour que ceux qui nous informent soient victimes d’une telle hargne ?
La défiance envers les médias
Le mouvement des Gilets Jaunes est né d’une volonté de se faire voir et entendre. Les médias sont donc bien au cœur de cet enjeu, eux qui nous rendent visible notre monde et participent à son récit. Or quand on se penche sur les programmes des grandes chaînes, force est de constater que les classes moyennes, les non métropolitains, les campagnards, sont loin d’être bien représentés.

Ils font partie des « petits sujets » bons pour la presse locale. Les journalistes sont concentrés à Paris, et cela se voit et s’entend. Ainsi les journalistes sont-ils tous mis dans le même sac de l’élite parisienne, lointaine et hautaine, « de mèche avec l’État ». Et tant pis si ils sont mis dans le même sac les journalistes de terrain, ceux qui sont au plus près de la population, ou la presse régionale. La violence ne se justifie pas, mais elle s’explique. Et le mouvement des Gilets Jaunes, né sur les réseaux sociaux, cherche à échapper au discours habituel des grands médias dans lesquels une grande partie des Français ne se sent pas représenté.
Journalistes, police, politique : les pouvoirs s’affrontent
Depuis le mois de décembre, une vingtaine de plaintes a été déposée par des journalistes pour confiscation de matériel de protection par les forces de l’ordre, sous menace de mise en garde à vue. D’autres seraient pris pour cible alors qu’ils sont visibles, portant leur brassard de presse. Acrimed dénonce le manque d’information sur ces violences policières par les grands médias eux-mêmes. Sur le terrain, les pouvoirs s’affrontent : le pouvoir des casques et des bombes lacrymogènes, le pouvoir des foules, le pouvoir des caméras. Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières, a appelé sur BFM les politiques à réagir.
« Malgré toutes ces violences policières, y compris contre les journalistes, les agressions de la part de la police sont minorées par les médias dominants. » (Acrimed).
À la botte du gouvernement pour les uns, attisant la haine des foules contre la police pour les autres, les journalistes semblent devoir retrouver leur place dans une société minée par les frustrations et la violence d’une certaine forme de misère.
Image à la une : Jérémie Lusseau / Hans Lucas via AFP