À Marseille, l’association En passant par les calanques repense la randonnée comme un outil d’émancipation et de soin collectif. Au cœur des calanques, elle accompagne des personnes confrontées à des trajectoires difficiles - fragilisées par l’exclusion sociale, la précarité ou des souffrances psychiques - à travers des expériences partagées. Bien plus qu’une simple activité sportive, ce projet se veut inclusif, participatif et solidaire, offrant un espace de connexion et d’ouverture à l’autre.
Une intervention psychosociale par la nature et l’aventure
Concrètement, ce projet propose une quarantaine de journées par an, principalement axées sur la randonnée, dans les sentiers abrupts et les panoramas du littoral méditerranéen.
L’approche singulière de l’association En passant par les calanques s’inspire d’une méthode appelée IPNA, pour « intervention psychosociale par la nature et l’aventure », testée au Québec depuis le début des années 2000. L’axe de promotion de cette approche vise à la soutenir à travers des formations, des ateliers d’échange d’expérience, des publications et des actions de plaidoyer.
« L’édition d’un guide sur leurs pratiques, qui servira de support de formations et d’inspiration, est en cours » commence Alexandra, formatrice en santé communautaire et fondatrice d’En passant par les Calanques, pour la Relève et La Peste.
Les impacts positifs et les effets thérapeutiques de la pratique d’une activité physique dans la nature ont déjà été démontrés par de nombreuses études. En effet, un véritable processus de guérison s’établit grâce à la réduction du stress, la régulation des émotions et un sentiment de bien-être favorisé.
Selon Martin Niedermeier, scientifique du sport à l’Université d’Innsbruck, en Autriche et auteur principal de l’étude, publiée en 2017, une randonnée de seulement 30 minutes réduit les hormones du stress jusqu’à 28 %.
Une autre étude parue dans la Revue internationale d’éducation physique, de loisirs et sports en Janvier 2025, sur les randonnées de groupe bihebdomadaires pendant six mois a montré une nette amélioration de l’humeur et de la résilience mentale chez les adultes soumis à un stress élevé. Une donnée approuvée par le rapport d’En passant en Calanques qui affirme que plus de 80 % des participants constate une nette amélioration de leur humeur et de leur vitalité après les randonnées.
Au-delà de la prise de conscience de leur capacité à relever des défis sportifs et sociaux, « les participants sortent de l’isolement et signalent un mieux-être psychologique : ils ruminent moins, dorment mieux et reprennent des démarches comme la recherche d’emploi » confirme Alexandra.
Elle continue en expliquant que « pour évaluer l’impact du projet sur les participants, plusieurs données et résultats sont recueillis ». Le processus d’auto-évaluation continu et que la boussole de l’expérience, qui permet aux participants de partager leurs sensations, actions, émotions et pensées, démontre « des sentiments de bien-être, de satisfaction, de plaisir d’échange, d’amour, de gratitude, d’émerveillement et de joie ».
Des rendez-vous collectifs pour se dépasser et rencontrer
Au-delà des bénéfices individuels, c’est le collectif qui fait la force. 75% des participants sont concernés par la psychiatrie et/ou par l’exclusion sociale, mais la marche met tout le monde au même niveau.
À travers des moments de cohésion de groupe et de binômes de discussion, « le projet permet aux participants de se reconnecter et renforcer leur lien à soi, aux autres, à la nature » insiste la formatrice de l’association. Et la pratique sportive, prétexte pour rencontrer et échanger, sert de ciment social créant un sentiment d’appartenance et de confiance, souvent absente du quotidien des participants.
Les participants sont également impliqués dans la co-construction des activités du projet. « Chaque année, une rencontre est organisée pour élaborer le programme ensemble, pour qu’ils puissent choisir les lieux à découvrir et les thèmes de discussions abordés pendant les activités, plutôt que l’équipe ne les propose ». À travers les échanges, les participants accèdent à une meilleure connaissance du réseau local, des acteurs et des ressources, qu’ils peuvent ensuite mobiliser.
120 personnes différentes ont participé aux journées fondées sur l’IPNA au premier semestre 2025 dans le cadre de 335 participations cumulées au cours de 18 journées de randonnée. « Depuis la création en 2022, on a aussi proposé quelques journées en kayak et des séjours » complète Alexandra.
Les objectifs pour les prochaines étapes du projet sont fortement influencés par les financements. « Le projet attend une réponse à une dernière demande. Actuellement, seule la moitié du budget prévisionnel a été obtenue pour l’année » termine Alexandra. Par conséquent, l’équipe ne peut actuellement pas proposer une journée de marche par semaine, mais espère maintenir au moins une activité par mois en attendant.