Mardi 1er août, le Luxembourg a promulgué une loi permettant aux entreprises présentes sur son territoire d’exploiter les ressources spatiales. Si à l’heure actuelle, nous ne disposons pas des moyens techniques nécessaires à l’exploitation, ce texte de loi ouvre la voie à une nouvelle forme de conquête spatiale : la prédation.
Voté au mois de juillet, le premier texte de loi autorisant les entreprises installées au Luxembourg à explorer et utiliser les ressources spatiales est entré en vigueur mardi 1er août. Le duché emboîte ainsi le pas aux Etats-Unis qui avaient voté une loi identique en 2015. Métaux, hydrocarbures et eau peuvent désormais être exploitées par les acteurs privés sous réserve d’obtention d’un agrément du ministère de l’Economie. Pas sûr que ce soit une si bonne nouvelle que ça…

Avec cette loi, le Luxembourg cherche avant tout à inciter les entreprises étrangères à s’implanter sur son territoire. En effet, le Grand-Duché ne dispose d’aucune agence spatiale et n’a rejoint l’Agence spatiale européenne qu’en 2008. Même si l’Etat luxembourgeois « détient 17% du deuxième opérateur mondial de satellites, la Société européenne de Satellites, [et] est aussi actionnaire de Planetary Resources » rappelle Le Monde, son intérêt est avant tout financier.
Dans la directe lignée de l’esprit de conquête de l’Ouest, de plus en plus de grands entrepreneurs américains, à l’image d’Elon Musk ou même du réalisateur David Cameron, s’intéressent à la conquête spatiale et à l’exploitation de ses ressources. C’est ce qu’on appelle l’industrie du « NewSpace », dans laquelle plus de 1 000 entreprises – majoritairement américaines – investissent massivement. Leurs objectifs sont variés : parmi les quatre entreprises déjà installées au Luxembourg, Deep Space Industry et Planet Resources veulent développer l’exploitation des ressources spatiales, notamment sur les astéroïdes, Ispace est spécialisée dans la robotique et Blue Horizon veut rendre la vie dans l’espace possible.
En effet, si nous ne disposons pas de moyens techniques suffisants pour lancer des opérations minières dans l’espace, le petit Etat fait le pari d’un business qui pourrait s’avérer très fructueux à l’avenir. Les astéroïdes notamment seraient de véritables mines d’or ; la NASA est d’ailleurs en train de préparer une expédition pour 2022 afin d’étudier l’astéroïde Psyché, un corps céleste de plus de deux cents kilomètres de diamètre composé de ferronickel qui « pourrait avoir une valeur supérieure à toutes les ressources de la Terre cumulées » d’après arte.tv.

Pourtant le projet du Luxembourg est loin de faire l’unanimité au sein de la communauté européenne. Relayé par le Monde, un scientifique européen aurait confié à l’AFP :
« Plusieurs Etats membres de l’Union européenne ne vont pas dans ce sens-là. Quand on dit qu’on peut avoir accès à tous les matériaux à l’avenir, on ouvre la boîte de Pandore vers un gaspillage des ressources et la fin du recyclage parce qu’on se dit qu’on en aura autant qu’on le souhaite »
En effet, en voyant dans l’espace un nouveau terrain de jeu qui serait capable de suffire à notre rythme effréné de consommation et pourrait même éventuellement nous accueillir, ces acteurs du « NewSpace » qui sont également les dirigeants des plus grandes firmes internationales (Amazon, Facebook, Google, etc.) risquent de condamner définitivement notre planète. Pourquoi remettre en question notre modèle de société quand il suffit d’exploiter de nouveaux territoires ?
Le véritable problème est qu’il n’existe actuellement presque aucune restriction en termes de droit spatial. Si le Traité de l’espace de 1967 posait le principe de « non-appropriation » des territoires spatiaux, en revanche il n’interdisait nullement l’appropriation de ressources spatiales.
Encore une fois, nous nous apprêtons à ouvrir la voie à la privatisation source de conflits et de dérives au lieu de garantir à l’espace sa caractéristique fondamentale de bien commun universel.

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