En France, le financement politique par les entreprises est interdit. Il n’en est pas de même au niveau européen. En 2018, le groupe eurosceptique des Conservateurs et réformistes européens (CRE) a reçu plus de 102 000 euros de la part de neuf sociétés (AT&T, Triple A, Estiom, MTI, Wastech, Galerie Gema, Q.E.D. Systems, Without Limits et AWS Holding), ainsi que 47 000 euros de plusieurs lobbys et fondations.
Le Parti populaire européen (PPE), mouvement de droite auquel sont rattachés Les Républicains, a quant à lui reçu 61 000 euros pour l’accueil de quatre multinationales (AT&T, Walt Disney, Microsoft et UPS) à son congrès annuel, en novembre 2018.
Enfin, l’Alliance des libéraux et des démocrates pour l’Europe (ALDE) qui regroupe des forces politiques centristes et libérales de plusieurs pays européens, a aussi bénéficié d’importants financements provenant de Bayer, Uber, Google ou encore Syngenta, le géant suisse des pesticides. En 2018, le parti a reçu 122 000 euros de la part de huit multinationales et lobbys. Ceux-ci ont versé de 7 000 à 18 000 euros pour intervenir lors du congrès annuel du parti, organisé en novembre 2018 à Madrid.
Une pratique courante et parfaitement légale
« C’est une pratique courante et parfaitement légale : nous ouvrons nos débats à ces entreprises, qui participent en retour aux frais d’organisation de ces événements », explique Didrik de Schaetzen, directeur de la communication de l’ALDE.
De leur côté, comment les entreprises justifient-elles une telle générosité ? Interrogé par Le Monde, Bayer a déclaré avoir cosponsorisé des congrès de l’ALDE pour « faciliter un large débat sur divers sujets tels que l’innovation, l’agriculture ou le commerce ».
La défense de quels intérêts ?
Bayer se place comme deuxième plus gros donateur politique européen, derrière l’opérateur de télécommunications américain AT&T, ce dernier ayant versé plus de 200 000 euros aux quatre plus grands partis politiques européens au cours des cinq dernières années. L’influence du groupe allemand, qui a récemment acquis le très fameux spécialiste américain des pesticides Monsanto, est emblématique du problème soulevé par ces pratiques.
Alors que se pose la question du respect de certains principes de démocratie les plus essentiels – défendre l’intérêt des citoyens avant celui des grandes entreprises – les partis revendiquent une simple ouverture aux « parties prenantes ». « On a aussi des relations avec des ONG », garantit notamment M. de Schaetzen. Dommage, aucune d’entre elles n’a été conviée au congrès du parti à Madrid.