Un ancien chauffeur de camion, travaillant pour le compte d’un sous-traitant d’ArcelorMittal a affirmé lundi au micro de France Bleu Lorraine avoir « déversé de l’acide d’ArcelorMittal Florange dans la nature ». Vidéo à l’appui, il nous montre les dessous scandaleux de l’entreprise de sidérurgie, qui peine désormais à sortir la tête de l’eau.
ArcelorMittal engagé pour l’environnement ?
En ouvrant la page du site officiel d’ArcelorMittal, l’onglet « Sustainability » (« développement durable » en français) attrape immédiatement le regard. Vantant les mérites de leurs 10 engagements pour le développement durable, le sourire confiant de Lakshmi N. Mittal, directeur d’ArcelorMittal, dissipe tous nos doutes et toutes nos craintes. Comment pourrions-nous douter de la bonne foi d’une entreprise qui prend tant à cœur la communication de son action environnementale ?
Malheureusement, l’orage commence à poindre à l’horizon pour le géant de la sidérurgie. Lundi 3 juillet, un chauffeur de route employé par l’un des sous-traitants d’ArcelorMittal Florange (Moselle), a témoigné de l’expérience « environnementale » qu’il avait eu avec le groupe. De quoi enlever son sourire au président du groupe. En effet, l’accusation est grave : d’après le camionneur (qui souhaite conserver l’anonymat), l’entreprise sous-traitante d’ArcelorMittal Florange l’aurait chargé de déverser des centaines de mètres cube d’acide dans un crassier.
Les économies avant tout
Bien évidemment, les choses n’ont pas été présentées de la sorte. L’homme témoigne au micro de France Bleu Lorraine :
« Je transportais l’acide usagé. Normalement je devais le ramener dans un centre de recyclage à Maloncourt. Mais on me disait de charger l’acide et d’aller au crassier, avec la complicité de salariés d’Arcelor qui me donnaient les bons [de livraison, ndlr] eux-même. Les bons n’indiquaient pas que c’était de l’acide. Ils indiquaient seulement que c’était de la boue de fer ou de la boue d’épuration. J’arrivais à Florange, à la cockerie, au PC sécurité, et là je me retrouvais dans un crassier à brancher mes tuyaux et déverser mon chargement en pleine nature, directement au sol. Les rochers éclataient à cause de l’acidité du produit. Le soir je rentrais avec les yeux rouges. »
Et pour cause : les entreprises utilisant des produits industriels dangereux sont contraintes par la loi de recycler ces produits. La loi du 15 juillet 1975 fixe le cade législatif de l’élimination des déchets et de la récupération des matériaux. Elle a été complétée par le décret du 4 janvier 1985 qui impose un Bordereau de Suivi de Déchets, pour toute évacuation de déchet toxique. En cas de manquement à cette loi le prévenu peut encourir une amende de 305 à 76 225€ et une peine de deux mois à deux ans de prison. Autant dire qu’il est plus avantageux financièrement pour une entreprise de cette envergure de risquer une amende « légère » que de supporter des dépenses quotidiennes pour recycler ses déchets toxiques…
Encore un lanceur d’alerte licencié
Intérimaire pour le sous-traitant d’ArcelorMittal, le chauffeur de camion parle de 24m3 déversés tous les jours dans ce crassier situé « à moins de 2 km à vol d’oiseau des habitations » pendant tout la durée de ses trois mois de contrat. Cela lui laisse d’ailleurs le temps de prendre une vidéo plus qu’édifiante. On y voit un produit jaune fluo dégageant d’impressionnantes fumées blanches au contact de l’eau. Inquiet de cette situation, l’homme avait également alerté un pompier travaillant pour ArcelorMittal. Mais très vite, l’information remonte aux oreilles de la direction qui licencie l’intérimaire pour « rupture de discrétion commerciale ». Depuis, l’homme est au chômage et « n’arrive plus à retrouver du travail », un situation devenue coutumière pour les « lanceurs d’alerte » du quotidien qui sont insuffisamment protégés par la loi.
Acid Test
ArcelorMittal France a immédiatement démenti les accusations assurant qu’ « aucun risque sanitaire ni environnemental pour les population n’est à signaler » et déplorant les « incohérences des informations relatées par la presse ». Elle a également annoncé avoir lancé une enquête interne pour éclaircir la situation, notamment concernant le site du crassier qui est une « zone de stockage de résidus du site ArcelorMittal de Florange » soumise à de nombreuses réglementation en tant qu’Installation Classée pour la Protection de l’Environnement (ICPE). Beaucoup de points à éclaircir donc pour une entreprise qui dénonce pourtant les incohérences des discours tenus par la presse…
La Direction régionale de l’environnement (Dreal) a à son tour ouvert une enquête pour vérifier le parcours et la traçabilité des déchets de l’entreprise. C’est en effet la Dreal qui est chargée de contrôler le respect des normes environnementales au sein du crassier et le dernier contrôle datait de novembre 2016. La CGT de l’entreprise a quant à elle demandé de pouvoir faire appel à une société d’experts indépendante dans le cadre du CHSCT (comité hygiène et sécurité) de l’entreprise. Etonnant non ?

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