La sortie de l’état d’urgence, renouvelé depuis bientôt 2 ans, est l’une des promesses de campagne du président Macron. Mais plutôt que de rétablir le régime normal des libertés publiques, notre monarque jupitérien s’apprête à faire rentrer dans le droit commun les principales dispositions de ce régime d’« urgence ». Un renforcement du pouvoir exécutif qui n’a jusque-là pas porté ses fruits dans la lutte contre le terrorisme, mais qui continue de menacer les libertés individuelles.
Deux projets de lois bientôt discutés à l’Assemblée nationale
Deux projets de loi sur l’entrée dans le régime commun de l’essentiel des mesures concernant l’ « état d’urgence » seront bientôt débattus « en accéléré » à l’Assemblée nationale. Le gouvernement a choisi de ne pas respecter le délai habituel de 6 semaines fixé par la loi, évitant ainsi la mise en place d’un débat de fond sur l’efficacité de ces mesures et une confrontation directe avec la société civile…
Un régime exceptionnel qui devient la règle donc, pour éviter au Président de reconduire une septième fois l’état d’urgence sur le territoire français. En effet, l’introduction au Parlement de ces deux projets de lois semble suivre un agenda politique très bien ficelé puisque le 1er novembre, la France aura connu la plus longue période de son histoire sous ce régime d’exception. La sortie de l’état d’urgence promise aux électeurs et aux citoyens n’est donc qu’un vaste tour de passe-passe, qui marque l’entrée de nos sociétés dans un « état d’urgence permanent ».

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Mais que faire lorsque ces mesures, écrites pour être exceptionnelles et avoir une application limitée deviennent notre droit commun ? Que devient l’exception quand l’exception devient la règle ? On peut en effet craindre une escalade dans la restriction des libertés fondamentales, mécanisme souvent irréversible,
2 ans d’état d’urgence : un bilan catastrophique
Pour Flore Vasseur, interviewée sur France Culture :
« On est en train d’entériner un modèle de société où les citoyens sont une menace, où il faut avoir peur (…) au nom du terrorisme nous revenons sur des libertés acquises de longue date, et ce avec peu de débat et peu de mystère sur la capacité du Parlement à résister à cette impulsion ».
Pour Vanessa Codaccioni, maitre de conférences à Paris VIII en sciences politiques :
« Il existe des phénomènes de pérennisation de l’exception et des phénomènes d’autonomisation de cette exception : c’est ce que nous sommes en train de vivre ».
Du point de vue de l’efficacité, ces mesures ont pourtant largement démontré leurs limites : une commission parlementaire a rendu un rapport très mitigé sur les résultats de la mise en oeuvre des mesures d’urgence. La France possède déjà l’appareil anti-terroriste le plus complet d’Europe : pour Vanessa Codaccioni « les dix-sept attentats déjoués l’année dernière ne l’ont pas été grâce aux mesures d’urgence mais à celles du droit commun qui est suffisamment développé en la matière ». En effet les mesures contenues dans l’« état d’urgence » (assignation à résidence, et perquisitions réalisées sur la base de la suspicion) n’ont abouti qu’à très peu de procédures judiciaires…

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