Derrière cet objectif ambitieux, Drawdown est un projet mené par 70 chercheurs du monde entier. Il liste les 100 meilleures alternatives pour atteindre le moment où la concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère se mettra à diminuer d’année en année.
« 100 solutions pour inverser le réchauffement climatique »
Le terme « drawdown » est habituellement utilisé en anglais pour la réduction des effectifs militaires, des prélèvements dans le domaine de la banque, ou du pompage de l’eau des puits. Paul Hawken, écologiste et spécialiste du climat, l’emploie pour désigner la réduction de la quantité de carbone dans l’atmosphère.
« Drawdown désigne un objectif qui, jusque-là, a brillé par son absence dans la plupart des conversations sur le climat. S’attaquer aux émissions, les ralentir, voire les arrêter, sont certes nécessaires, mais insuffisants. Si vous vous êtes engagé sur la mauvaise voie, vous aurez beau ralentir, vous continuerez de vous enfoncer dans le mauvais chemin. Le seul objectif logique pour l’humanité est d’inverser le cours du réchauffement planétaire. » Paul Hawken, auteur de« Drawdown, Comment inverser le cours du réchauffement planétaire »

Le projet a été mené par 70 chercheurs, dont 40 % femmes, de 22 nationalités différentes. Pour établir un plan d’action, ces scientifiques et académiques se sont intéressés aux alternatives impulsées dans le monde entier, économiquement viables et scientifiquement valables. Parmi toutes les alternatives étudiées, ils en ont retenues 80 déjà existantes, « fruit de la sagesse collective de l’humanité », et 20 prometteuses, qu’ils ont classées selon des modèles climatiques et financiers. La mise en place de toutes ces alternatives constitue un plan d’action à destination des gouvernements, des communautés, des entreprises et des citoyens pour les trente prochaines années.
Les cinq premières d’entre elles :
- Retirer les climatiseurs et frigos à hydrofluorocarbure et les recycler en toute sécurité
- Investir dans l’éolien
- Réduire le gaspillage alimentaire
- Adopter un régime végétarien
- Protéger et replanter des forêts tropicales
D’autres solutions sont moins connues : alimenter les moutons en algues rouges pour réduire leur production de méthane, développer l’agroforesterie ou faire accéder à l’éducation les jeunes filles les plus pauvres pour qu’elles choisissent elles-mêmes le nombre d’enfants qu’elles souhaitent avoir, permettant ainsi de limiter la croissance démographique.
« Si vous consultez la littérature ou les médias sur le changement climatique, que nous dit-on à chaque fois ? Que nous ne pouvons pas dépasser 2°C dans le réchauffement climatique ou bien nous sommes foutus. Nous ne pouvons pas le faire en réunissant des experts une fois par an à Paris, Marrakech ou Bonn. Qu’est-ce que les gens du monde entier sont censés faire avec ce nombre ? Comment cela va-t-il avoir un impact sur eux ? Cela n’a aucun sens. Nous sommes la seule espèce sans plein emploi et nous n’avons jamais eu autant de travail à faire. Presque chaque solution que nous modélisons est basée sur un développement régénératif, et elles créent des centaines de millions d’emplois. » Paul Hawken
Des chiffres sans idéologie
Toutes les « solutions » listées dans le livre ne sont, de l’aveu-même de l’auteur « pas forcément toutes les meilleures. » De fait, pour accomplir leur travail, les 70 chercheurs se sont concentrés uniquement sur les résultats financiers et climatiques en chiffres, et pas nécessairement sur les conséquences de certaines solutions, notamment dans le domaine de l’énergie.

Ainsi, si l’éolien est la deuxième solution dans le classement, nulle mention n’est faite du coût écologique et social, notamment en Chine, induit par l’utilisation des métaux rares pour construire certaines des turbines qui les font tourner. L’exemple le plus frappant reste l’énergie nucléaire, classée en 20ème solution, alors même qu’elle est indiquée comme étant une « solution par défaut » :
« L’énergie nucléaire a du potentiel pour éviter les émissions de carbone, mais présente de nombreuses menaces : effondrements mortels, rejets de tritium, mines d’uranium abandonnées, pollution par les résidus miniers, déchets radioactifs, trafic illicite de plutonium et vols de matériel de missiles. »
En France, limiter notre dépendance au nucléaire est ainsi l’un des enjeux majeurs de notre transition énergétique.

« Si nous modifions notre point de vue, et si nous considérons que le réchauffement climatique est une évolution positive, une transformation atmosphérique qui nous encourage à changer et à réimaginer tout ce que nous fabriquons, tout ce que nous faisons, alors nous entrons dans un monde différent. Nous en assumons l’entière responsabilité et cessons d’en rejeter la faute sur les autres. Nous voyons le réchauffement climatique non comme un événement inévitable mais comme une invitation à bâtir, à innover, à tout changer ; il nous ouvre la voie de la créativité, de la compassion et du génie. Notre programme n’est ni gauchiste, ni conservateur. Il est humain. » Paul Hawken
Attaché à une rigueur pragmatique et scientifique, ce livre ne donne pas de réponse sur la nouvelle civilisation que nous pourrions créer, et du nouveau mode de vie, plus sobre pour les pays développés, plus juste pour les pays plus pauvres, que nous pourrions adopter. A nous de l’inventer.