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En 2017, 30,6 millions d’êtres humains ont dû fuir leurs villes pour causes de conflits et de changement climatique

Les désaccords à propos de l’accueil des migrants en Europe ou aux Etats-Unis semblent éclipser une autre réalité : celle des « déplacés internes ». Or, les migrations forcées à l’intérieur d’un pays sont principalement causées par des événements climatiques extrêmes. Les pays développés sont loin d’être étrangers à ces catastrophes, directement en lien avec le réchauffement climatique. […]

Les désaccords à propos de l’accueil des migrants en Europe ou aux Etats-Unis semblent éclipser une autre réalité : celle des « déplacés internes ». Or, les migrations forcées à l’intérieur d’un pays sont principalement causées par des événements climatiques extrêmes. Les pays développés sont loin d’être étrangers à ces catastrophes, directement en lien avec le réchauffement climatique.  

Déplacés internes 

En un an, tous les habitants des aires urbaines de Paris, Lyon, Marseille, Aix-en-Provence, Toulouse, Bordeaux, Lille, Nice, Nantes et Strasbourg contraints de quitter leur ville… Un scénario-catastrophe difficilement imaginable. Et pourtant, ce sont 30,6 millions de personnes, soit l’équivalent de la population cumulée de ces villes françaises, qui ont dû fuir leur lieu de vie en 2017. Ce chiffre vient du rapport de l’Internal Displacement Monitoring Center (IDMC). Il concerne les populations qui ont fui leur village ou leur ville mais sont restées dans leur pays : les « déplacés internes ». 

Parmi eux, 11,8 millions sont victimes de conflits. . « C’est le chiffre le plus élevé depuis dix ans et il est dû pour plus de moitié à la situation dans trois pays, Syrie, Irak et République démocratique du Congo, qui vivent des crises humanitaires majeures. » explique la directrice de l’IDMC, Alexandra Bilak. 

Un chiffre hallucinant, mais qui n’égale pas celui des déplacés environnementaux. 18,8 millions de personnes ont été forcées de quitter leur terre par des catastrophes naturelles comme les inondations, les tempêtes et les ouragans. Sur la période 2008-2016, l’ONG internationale Oxfam avance pour sa part que 22 millions de personnes par an se sont déplacées à cause du dérèglement climatique. 

La menace d’une crise migratoire 

Dans son rapport sur les déplacés climatiques publié le 19 mars, la Banque mondiale s’est focalisée sur les trois régions cumulant 55% de la population des Etats en développement : l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud et l’Amérique latine. L’institution internationale s’est servie d’un modèle croisant plusieurs indicateurs environnementaux (hausse de la température, montée du niveau de la mer, précipitations…) avec des données démographiques et socio-économiques. D’ici à 2050, 143 millions de personnes pourrait connaître des déplacements internes causés par les effets du réchauffement de la planète. 

Les facteurs impactant les populations sont multiples. Alors que le Bangladesh est touché par la submersion de ses zones côtières et un accès difficile à l’eau potable, l’Ethiopie, où l’agriculture est essentielle, voit une baisse de ses récoltes. Et ce pays devrait connaitre une croissance démographique allant jusqu’à 85% dans les prochaines années. 

En outre, cette étude ne mentionne pas les petits Etats insulaires, les premiers touchés par le changement climatique. « Aucun pays du Nord n’est cité dans le rapport, mais cela ne veut évidemment pas dire que l’Europe ou les Etats-Unis ne sont pas confrontés, eux non plus, à la problématique des migrants climatiques. » ajoute Alex de Sherbinin, de l’Institut de la terre de Columbia. 

Une situation inéluctable ?

La crise migratoire due au changement climatique n’est pas une fatalité. « Si l’on parvient à limiter les émissions de gaz à effet de serre et à encourager le développement par des actions en matière d’éducation, de formation, d’usage des terres… ce sont seulement 40 millions de migrants climatiques, et non 143 millions, auxquels ces trois régions devront faire face. » soutient John Roome, le directeur en charge du changement climatique à la Banque mondiale.

Pour cela, il faudrait inverser la tendance observée par l’Organisation mondiale du tourisme : en 2017, le tourisme international a progressé de 7 %, la plus haute augmentation depuis sept ans. Or, le 7 mai, une équipe de chercheurs australiens, chinois et indonésiens a publié dans la revue Nature Climate Change une étude sur l’empreinte carbone du tourisme mondial. Celle-ci est considérable. En compilant les émissions directement associées aux transports (combustion du kérosène des avions, essence ou gazole des voitures) et celles liées aux biens et aux services consommés par les voyageurs (restauration, hôtellerie, achats) ils ont estimé que le tourisme était responsable d’environ 8 % du total des émissions de gaz à effet de serre de l’humanité.

Les trajets et les séjours intérieurs sont la source de la plus grande partie des rejets carbonés, plus encore que les voyages à l’international. À l’origine d’un quart des « émissions touristiques » , les Américains pèsent lourdement dans ce bilan. Les autres grands pays émetteurs sont la Chine, l’Allemagne, l’Inde, le Mexique, le Brésil, le Canada, le Japon, la Russie et le Royaume-Uni.

La responsabilité des Etats 

En plus d’une réduction de la pollution, un travail juridique reste à faire pour pallier ce problème des « déplacés internes ». À la différence des réfugiés cherchant asile dans un pays étranger, ceux-ci n’ont pour l’instant aucun statut juridique assurant leur protection. Cela va à l’encontre des objectifs de l’Organisation des Nations unies que sont le maintien de la paix et de la sécurité, le respect des droits de l’homme et le développement durable. Des discussions sont donc en cours pour préciser le statut de ces migrants climatiques, et l’Assemblée générale des Nations unies doit adopter en septembre un Pacte mondial sur les migrations. Cependant, en décembre 2017, Donald Trump l’a jugé « incompatible » avec la politique migratoire américaine et a annoncé le retrait des Etats-Unis de ce projet.

Cette décision montre bien que la communauté internationale n’a finalement que peu de prise directe sur la gestion de ces drames humains. Les actions concernant les migrations intérieures relèvent de la souveraineté de chaque Etat. Pour reprendre les mots d’Alexandra Bilak, « au-delà de l’amélioration de la réponse qui peut être apportée à ces crises par des programmes d’aide humanitaire, les gouvernements eux-mêmes doivent se saisir de cette question. La communauté internationale doit aider, par un dialogue constructif, à trouver des solutions adaptées à chaque pays. ».

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