C’était une « première mondiale ». Dès le lendemain des législatives, une quarantaine de scientifiques ont proposé aux députés qui le souhaitaient une formation accélérée aux enjeux climatiques et environnementaux. En trois jours, du 20 au 22 juin, 154 élus, soit 27 % du nouvel hémicycle, ont été accueillis sous les chapiteaux blancs dressés pour l’occasion place des Invalides, à moins de cent mètres de l’Assemblée nationale.
Chapeautée par Matthieu Orphelin, ex-député écologiste de Maine-et-Loire, et Christophe Cassou, climatologue au CNRS, cette « formation premiers secours » avait pour but de fournir aux nouveaux représentants un cadre de réflexion commun et une connaissance minimale des questions de climat et de biodiversité, trop souvent ignorées dans les deux chambres du Parlement.

« Ces enjeux pâtissent clairement d’un déficit de compréhension à l’Assemblée nationale, confirme Hugo Viel, activiste et collaborateur parlementaire de Matthieu Orphelin. Sinon, les lois iraient bien plus vite. C’est d’ailleurs de ce constat qu’est venue l’idée de la formation. »
Une « mallette d’accueil » remise aux députés
En tête à tête, en groupe ou en binôme, les quarante scientifiques (bénévoles) devaient transmettre le plus d’informations possible aux députés, en une trentaine de minutes maximum.
Pour les aider à résoudre cette équation complexe, ils disposaient d’une batterie de documents tels que le dernier rapport du GIEC en trois fois « dix points clés », des synthèses de l’IPBES sur la biodiversité, ou des rapports émanant du ministère de la Transition écologique et du Haut Conseil pour le Climat – autant d’institutions dont le travail fait autorité, en France ou dans le monde.

En repartant, chaque député s’est vu remettre une « mallette d’accueil » contenant en outre une liste des « principales échéances législatives sur le climat et la biodiversité » : parmi elles, le Plan stratégique national d’application de la nouvelle PAC (qui sera voté cet été), ou plus importante encore, la Loi de programmation énergie-climat (premier semestre 2023), dont dépendra une série d’autres textes tels que la Stratégie nationale bas carbone.
La droite et l’extrême droite sous-représentées
Sur les 154 députés ayant répondu à l’appel, l’écrasante majorité provenait soit de la coalition présidentielle (80) soit de celle des partis de gauche (70). Un seul député des Républicains et un seul du Rassemblement national étaient au rendez-vous. « Ce n’était pas la priorité de ces deux groupes pour la rentrée », commente sobrement Hugo Viel, qui préfère « laisser chacun faire ses propres analyses sur ces chiffres ».
Selon le jeune activiste, les élus présents aux Invalides se sont montrés, pour la plupart, « sympathiquement surpris ». Beaucoup ont salué l’initiative et se sont accordés à dire qu’il faudrait la généraliser, tout en reconnaissant l’importance du sujet.
« Il n’y a pas eu de déni, mais de l’écoute, beaucoup d’intérêt pour la parole scientifique qui n’était jamais remise en cause, témoigne Hugo Viel. En revanche, les solutions divergeaient. Certains députés avaient tendance à minimiser les problèmes, ou à se leurrer sur la réalité du changement à opérer… » Entre l’écoute et une véritable prise de conscience, le cap serait difficile à franchir.
Se réjouissant d’une « première étape réussie et encourageante », les organisateurs de ce marathon climatique proposeront d’ici peu aux députés volontaires des « mises à niveau annuelles », « une formation par groupe ou par commission », ainsi qu’un « approfondissement de certains points ».
Avec Matthieu Orphelin et Christophe Cassou, espérons donc que, sous ce mandat, « les enjeux climat et biodiversité dépasse[ront] les clivages ».